L’attitude
tolérante ne suscite pas tout de suite et obligatoirement la sympathie dans les
structures religieuses, politiques, ou chez certains particuliers, anxieux ou
bétonnés.
La tolérance
peut être soupçonnée de mollesse, de tiédeur. Elle prospérerait surtout sur les
terrains de manque de conviction, de faiblesse et aurait la vertu de l’édredon
qui amortit le choc. Elle serait comme une anesthésie de la conscience, comme
une forme d’éteignoir. « Il y a des maisons pour cela », disait le si grand et
pourtant si intolérant Paul Claudel...
En vérité,
être tolérant, c’est découvrir tout au long de l’existence, de choix en choix,
dans les situations quotidiennes, avec une volonté tendue vers le respect, que
le chemin de la tolérance est un chemin difficile pour ne pas succomber à la
facilité. Être tolérant, c’est se connaître soi-même, être tolérant avec
soi-même, avec ses blessures, ses richesses, et s’ouvrir alors aux autres dans
leurs différences, accepter d’être transformés par eux, tout en restant fidèle
à soi-même. Être tolérant, c’est accepter d’être accepté par les autres, pour
pouvoir les recevoir avec leurs richesses, leurs pauvretés, leurs soleils et
leurs ombres, et la différence de leurs couleurs.
Disponibilité,
attente, désir, choix, ouverture, dépouillement - le dirais-je ? Amour - autant
de mots qui disent la condition forte, riche et pauvre, exigeante et
silencieuse de la tolérance. La vérité de chacun est insaisissable, elle lui
appartient et il ne sait pas la dire. En théorie, la tolérance est facile
lorsqu’on parle de dignité et de tolérance dans les pays lointains, et loin des
frontières. Elle est une exigence difficile dans les rencontres quotidiennes. «
Le fossé le plus proche est le plus difficile à franchir », dira Friedrich
Nietzsche.
RENÉ-XAVIER NAEGERT,
DIT LE « POPE »
(1925-2015) aumônier
de l’École normale de Strasbourg